Les joueurs sont-ils des sportifs ?

C’est la question posée par Xavier de la Porte dans un article du monde.fr. Son analyse est plutôt intéressante :

La lecture de la semaine est courte et contextuelle, puisqu’en ces jours de Coupe du Monde de football, elle aborde, un peu de biais, la question du sport. Il s’agit d’un article du quotidien anglais The Telegraph, en date du 7 juin, lundi dernier. L’article relate une étude menée par l’Université d’Essex autour des joueurs de jeu vidéos, les gamers. Pas les gamers occasionnels, mais les gamers de haut niveau, les gamers professionnels qui peuvent gagner des dizaines de milliers de livres par an, en sponsoring ou en compétition. L’idée du professeur Dominic Micklewright, qui dirige l’unité de Recherche « Sport, performance et endurance » à l’Université d’Essex était de déterminer si le jeu sur ordinateur pouvait être considéré comme un sport. Il a conduit pour cela une série de tests physiques et psychologiques visant à comparer les performances de l’élite des gamers, et celles d’athlètes de haut niveau.

La première conclusion de cette étude est aussi attendue qu’inquiétante : si l’on s’en tient aux performances physiques de ces gamers, leur niveau est très faible et les résultats les rapprochent de gens beaucoup plus vieux, ou beaucoup plus jeunes. L’un des gamers étudiés par le professeur Mickelwright, âgé de 20, était fin, avait l’air en bonne santé et avait la physionomie d’un coureur de fond. Les tests ont révélé que ses performances pulmonaires et aérobiques étaient similaires à celles d’un gros fumeur de 60 ans.

Le professeur accuse logiquement le mode de vie gamer, qui consiste en gros à rester assis devant son ordinateur pendant une dizaine d’heures chaque jour et il en profite pour mettre en garde les jeunes contre cette dangereuse sédentarité : « on ne sait jamais comment ces paramètres vont évoluer, dit-il en parlant du jeune garçon cité plus haut, mais cela pourrait avoir des conséquences à long terme et favoriser le risque de crise cardiaque. Le temps passé devant un écran pendant l’enfance est en corrélation forte avec l’obésité infantile et les maladies cardiaques observables plus tard. »

Mais dans le même temps, le professeur Micklewright s’est dit très étonné par le nombre de caractéristiques que les gamers partageaient avec les sportifs de haut niveau : « leur temps de réaction, dit-il, leurs capacités motrices, leur sens de la compétition et les émotions qu’ils ressentent sont très proches. Les athlètes de haut niveau ont un niveau exceptionnellement haut de sentiments positifs et un niveau faible de sentiments négatifs comme la fatigue ou la dépression. On observe les mêmes caractéristiques chez les gamers, bien qu’elles ne soient pas aussi prononcées. »

Le professeur ajoute que les gamers auraient tout intérêt à intégrer l’activité physique dans leur mode de vie, mais que, de toute façon, le caractère sédentaire de leur activité empêche de les classer parmi les sportifs : « Il y a un lien inextricable entre les fonctions du corps et celles de l’esprit, ajoute-t-il. Le jeu vidéo partage de nombreuses caractéristiques avec le sport. Ce sont des compétitions, basées sur des aptitudes et encadrées par des règles. Mais la grande distinction qui empêche le gaming de faire partie des sports est l’absence d’exercice physique. Cependant, complète le professeur, au final, le sport obéit à une définition sociale et il en existe, comme le billard et les fléchettes, qui sont à la frontière. »

Voilà pour la conclusion, assez de bon sens il faut le dire, de cet article du Telegraph. Mais il appelle à mon avis plusieurs remarques.

D’abord, il est assez étonnant que les gamers arrivent à développer, sans doute de manière assez empirique, des aptitudes psychiques et mentales aussi performantes que les sportifs de haut niveau, sans l’entraînement et l’encadrement qui va avec. Car ces aptitudes sont remarquables au point que le professeur conclut dans son étude que la réponse des gamers aux stimuli visuels approche en vitesse celle de pilotes de jet. Et ce qu’il dit de leur disposition psychique, la question des « sentiments positifs », fait l’objet chez le sportif d’une préparation mentale aussi importante que l’entraînement physique. Que les gamers arrivent à cet état par leur pratique propre mérite d’être relevé et dit sans doute quelque chose des aptitudes que les jeux peuvent développer.

Sur l’aspect physique maintenant. Les résultats de l’étude semblent être indéniables sur les maigres performances des gamers. On voit bien tous les dangers de la sédentarité du gamer pour sa santé à long terme. Mais peut-on sérieusement affirmer que le sportif de haut niveau est en bonne santé ? Son corps est performant, certes, c’est sa raison d’être. Mais son corps est-il en bonne santé ? C’est une tout autre question. Les blessures à répétition, les séquelles évidentes, font partie de la vie du sportif de haut niveau. Tous les sportifs de haut niveau ne sont évidemment pas des handicapés à la fin de leur carrière, mais beaucoup en sortent avec un corps abîmé. Et c’est la quête de la performance, les traumatismes qu’il a subis pendant des années, qui l’ont abîmé.

Et je ne parle pas là du dopage, des chutes de cycliste ou des accidents des motards. Bref, la question que je me pose est la suivante : en quoi les conséquences d’heures passées devant un écran à ne pas utiliser son corps sont-elles plus dangereuses que les risques pris à la surutilisation du corps sportif ? Personnellement, je ne suis pas plus effrayé par un gamer obèse que par la deuxième fracture du péroné d’un footballeur sur-musclé ? C’est donc bien une affaire d’acceptation sociale qui est derrière tout cela. On accepte de sports reconnus comme tels qu’ils traumatisent les corps pour produire de la performance et du spectacle. On ne l’accepte pas du gaming, qui relève du divertissement. Il s’agit donc bien d’une question de statut et de la manière dont on considère le gaming. Si un jour il distrait les foules comme le fait le football, et engendre des subsides comparables, peut-être se montrera-t-on moins regardant sur les dangers de la sédentarité qu’il implique.

Xavier de la Porte

Publié par

Neithan

Neithan est le fondateur et grand chef de Bas Gros Poing. Quand il n'est pas en train de parler de sa passion pour Guilty Gear il se prend à croire qu'il peut changer le monde et manger des gateaux. (╯°Д°)╯︵ ┻━┻

17 réflexions au sujet de « Les joueurs sont-ils des sportifs ? »

  1. Étude très intéressante. Au moins en voila une qui ne crache pas sur cette activé.
    J’ai moi même gagné un écart du petit doigt, à force de jouer avec mon G15, que certains guitariste m’envie. Comme quoi ca a du bon XD.
    Par contre ce qui fait peur c’est la comparaison du type de 20ans qui a le souffle d’un fumeur de 60ans… ca promet!

  2. Reste une petite dose de mauvaise fois dans la conclusion…
    Là où le sportif de haut niveau s’en sortira avec des séquelles, des traumatismes, à la fin de sa carrière, par des accidents de parcours plus ou moins normales, le gamer de haut niveau, lui, peut ajouter une séance de sport par jour à son agenda pour et éviter les gros problèmes de santé physique.

    Qu’on soit « regardant » ou pas, je ne pense pas que comparer des accidents et une négligence.

    J’ai l’impression que c’est une mauvaise excuse pour ne pas faire de sport, formulé comme ça . . .

  3. Bonjour je cite sur le texte plus haut:

    « mais cela pourrait avoir des conséquences à long terme et favoriser le risque de crise cardiaque. Le temps passé devant un écran pendant l’enfance est en corrélation forte avec l’obésité infantile et les maladies cardiaques observables plus tard. »

    mais c’est vraiment n’importe quoi… l’obésité n’est pas née avec les jeux vidéos. Ne me dite pas qu’au temps de la Grèce antique ainsi qu’autre époque postérieur comme le Moyen-Age qu’il n’y avait pas de gens Obèses… regarder Louis 14 et tous les bourgeois du même genre ils étaient aussi gros que des éléphants sans compter ceux qui vont aux « Mac-donalds » qui eux font beaucoup d’obèses qu’autres choses…

    Deuxièmement je cite:

    Le professeur ajoute que les gamers auraient tout intérêt à intégrer l’activité physique dans leur mode de vie, mais que, de toute façon, le caractère sédentaire de leur activité empêche de les classer parmi les sportifs[…]Mais la grande distinction qui empêche le gaming de faire partie des sports est l’absence d’exercice physique.

    Faut bien comprendre qu’il faut pas tous le temps dire que le sport est bon pour la santé… j’ai 2 ami(e)s qui chacun deux problèmes différents
    la première à une maladie du cœur et si elle essaye de faire de faire trop d’effort elle risque une crise cardiaque…
    Mon deuxièmement amis a de l’asthme chronique il a perdu 40% de sa capacité respiratoire et son médecin l’interdit formellement de faire du sport… alors je pense qu’il faudrait aussi arrêter de dire des choses que l’humanité à considérer comme aquis sur la santé au cours des siècle passer car il existe des exceptions que peu de personne connaissent…

    Pour Finir, regardez les grand champion japonais du VS FIGTING comme Momochi ou Daigo et les autres ils sont mince comme des fil de soie…sérieux…

  4. @Diyo moi j’espère simplement que tu n’a jamais télécharger de fichiers illégaux de ta vie en torrent de la musique (par ftp) d’acquérir un photoshop d’adobe sans payer ou même d’obtenir un simple logiciel de traitement de texte comme un Word de Microsoft gratuitement ou d’autre logiciels du genre avant de critiquer les gens qui mettent des articles intéressants sur « basgrospoing »… j’en reviens juste pas quand je vois ce genre de réflexion…(faut arrêter de faire sa sainte-nitouche quand on est pas totalement clean de son coté)… ce n’est pas un jugement personnel c’est un simple constat…

  5. Je préviens juste hein, je ne fais aucun jugement.
    Et en supposant que je télécharge des « fichiers illégaux », je n’irais pas le crier sur tous les toits. On est sur un blog, par définition public, et Xavier de la Porte pourra facilement tomber sur son article entièrement copier/coller. Mais bon, peut-être qu’il s’en fout aussi… ou peut-être pas…
    Mon erreur aura été de le signaler dans les commentaires plutôt qu’en privé. Désolé.

  6. @diyo as tu remarqué que justement l’article est cité avec le nom de son auteur, qu’il n’est pas altéré et que l’article du monde cite lui meme un article d’un autre journal ? Bref je ne pense pas que ça puisse preter lieu à débat. Et puis si Xavier de la Porte émet une remarque sur la publication de son article nous en discuterons avec lui.
    Et si Neithan avait écrit : « Bous avez lu l’article du monde du tant ? Alors on va en parler. »
    je pense que tu l’aurais mal pris également.

  7. En plus Neithan est loin d’être obèse 😀

    Pour ce qui est de la sédentarité c’est juste un penchant exagéré de la pratique du eSport … Je suppose qu’un Daigo qui se déplace partout dans le monde et vis dans les salles d’arcade la question se posera différemment ( oh bien sur il soulèvera pas 250 kilo en développé couché comme pourrais le faire Ryu mais il doit pas être en mauvaise santé … )

    Dans ces conditions un étudiant très studieux et qui passe sa vie dans une bibliothèque a des risques cardiaques aussi :s ca veux pas dire que ce soit nécessaire pour être qualifié de « chercheur »

  8. @Vicarius : loin de moi l’idée de vouloir polémiquer, mais j’ai du mal à comprendre le sens (et le but) de tes remarques… 😕

    Première citation : bien sur que l’obésité n’est pas née avec les jeux vidéos, mais l’auteur n’a jamais rien dit de tel ; pour info’, corrélation signifie relation réciproque entre deux choses (tirée du Wiktionnaire). Passer du temps devant un écran favorise l’obésité. Être obèse à vite fait de provoquer une assiduité accrue devant son écran. Ce n’est pas une vérité absolue, mais c’est un fait indéniable.

    Deuxième citation : ne confondons pas « effet bénéfique » et « incapacité physique ». Si tes amis n’avaient pas ces problèmes de santé, je ne suis pas sur qu’une activité physique leur ait été néfaste. On ne contredit pas un principe avec des éléments qui, par nature, échappent à son champ d’application.

    Enfin, dernière remarque, tu cites Momochi et Daigo. Ça fait deux personnes sur les milliers de hardcore gamers qui existent à travers le monde. Dans un sens contraire on aurait très bien pu citer Kindevu et Justin Wong.

  9. Moi ce que j’ai retenu c’est qu’il faut jouer à la Wii ou avec Kinect ou le Playstation Move…

    Ca me rappel que dans GG XX: AC sur Wii il y a une option qui, si tu joues avec la Wiimote et le Nunchuk, t’indique combien de calories tu as brulé pendant le combat. 😆

  10. Tiens oui :p je réagis direct la :

    viscrious : « Pour Finir, regardez les grand champion japonais du VS FIGTING comme Momochi ou Daigo et les autres ils sont mince comme des fil de soie…sérieux… »

    L’article :  » L’un des gamers étudiés par le professeur Mickelwright, âgé de 20, était fin, avait l’air en bonne santé et avait la physionomie d’un coureur de fond »

    Voilaaaaaaaaa

  11. Je cumule Sport et Vs Fighting (voir les deux ensembles si un connard arrive à me battre) mais faut arrêter de croire que tout les joueurs se ressembles. Quand on était au Stunfest, on à croisé des joueurs (beaucoup) et tous étaient différent. Ce que je me demande surtout (question ouverte aux « journalistes ») c’est : de quoi ne parles-t-on pas pour faire de la place à cette none information ?

  12. Ben il faut préciser que l’article parle d’une catégorie particulière et non de la masse. Je sais pas si nos champions de VSF n’ont rien d’autre que la compétition dans leur vie.

  13. Personnellement, je me tape 10 a 16h de taekwondo par semaine, et quand je suis chez moi, je continu avec Kim, Hwoarang et maintenant Juri ^^! Enfin bref, j’ai plus l’impression de me flingué le corps au TKD que sur la console.

    Ce qui est débile dans cette études, c’est que le probleme vient des 10-11 heure passées devant un écran, chose que fait régulièrement la moitié de la population aujourd’hui avec leur boulot.

  14. Bien vu XanDeathBreak: nous vivons en effet une époque où il est vu comme dangereux de passer des heures devant un écran quand elle sont consacrées au jeux, tandis que quand c’est pour la finance ou toute autre activité professionnelle reconnue, c’est considéré comme normal et tout juste contraignant.
    De + les vrais gamers « pro » sont des types qui comme les sportifs doivent entretenir et améliorer leurs perfs, ils font donc en sorte d’être dans de « bonnes » conditions physique et mentale pour y arriver. Rien à voir avec les troupeaux de gros ricains gavés de fast-food et de gaming qui n’ont rien de joueurs de haut niveau. C’est bien ce que les jap ont compris: pour être vraiment compétitif, pas besoin d’être comme un sportif ou au contraire de faire sa grosse larve: il suffit d’une discipline, c’est à dire une rigueur et une concentration mentales et accessoirement physiques qui permettent de passer du stade d’accro de base aux jeux vidéo à celui de joueur de haut niveau. C’est comme pour le poker, les échecs ou le go: sont-ils considérés vraiment comme des sports d’ailleurs..?

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *